Interview de Laurence Champier, Directrice générale de la Fédération Française des Banques alimentaires

Depuis 37 ans, les Banques Alimentaires agissent contre la pauvreté et la précarité alimentaire. Selon une étude récente, 66% des bénéficiaires de l’aide alimentaire (2.145.000 en 2020), dont une large majorité y a recours pendant moins d’un an, viendraient chercher un accompagnement. Pouvez-vous nous en dire plus et nous présenter le profil des bénéficiaires ?

Les caractéristiques du profil socio-démographique des bénéficiaires sont dans l’ensemble stables : 70 % sont des femmes (majoritaires à exercer des emplois à temps partiel ou titulaires de contrats précaires) dont l’âge moyen est de 48 ans. On constate également que 30 % sont des familles monoparentales et que 80 % des personnes accompagnées sont sans activité.
Depuis 2018, nous observons des évolutions de ce profil : les bénéficiaires accueillis dans nos associations et CCAS partenaires sont de plus en plus diplômés mais « travailleurs pauvres ». Par exemple, 63 % ont un niveau scolaire supérieur à la 3ème ( + 4 points). Nous constatons une montée de la précarité chez les retraités (17%) et les personnes isolées (37 % ). Et la quasi-totalité ont un logement stable (86%).
Pour les Banques Alimentaires, l’aide alimentaire et l’accompagnement social sont indissociables. 66% des bénéficiaires déclarent que leur besoin d’être accompagné et aidé est important. C’est pourquoi en premier lieu les Banques Alimentaires proposent des formations gratuites à l’écoute et à l’accueil pour former les bénévoles de nos associations et CCAS partenaires afin de faciliter le lien.
Ensuite, nous mettons en place partout où cela est possible des ateliers cuisine et « prévention santé ». Plus de 4000 ateliers cuisine ont été animés en 2019 à destination de 40 000 personnes en situation de précarité. Depuis septembre 2021, les ateliers cuisine-prévention santé ont repris, la demande d’accompagnement est très forte, nos animateurs sont très sollicités. Les confinements successifs ont renforcé l’isolement des plus précaires, rendant plus que jamais indispensables ces temps d’échanges et de lien social.

En février 2020, vous avez lancé le programme « prévention santé ». Pouvez-vous nous expliquer quelles en sont les grandes lignes et comment s’inscrit-il dans votre action de soutien aux personnes en situation de précarité ?

Le projet « prévention santé » a pour objectif de contribuer à améliorer l’état de santé des personnes en situation de précarité alimentaire. Il propose une offre innovante d’ateliers et une formation sur la précarité alimentaire. 
Nous le co-construisons avec les animateurs d’ateliers cuisine-prévention santé. Ce projet comprend 5 volets : la conception d’outils pédagogiques pour les animateurs et pour les bénéficiaires finaux, la formation de nos animateurs (diabète, optimisation des courses alimentaires, éducation au goût, utilisation d’outil numérique…), la création d’un programme de formation « Précarité alimentaire » pour les acteurs du champ du social, l’actualisation du guide des ateliers cuisine et la création d’un dispositif de prévention contre le diabète.

Le 1er juillet 2021, vous avez signé une convention de partenariat pluriannuel avec Prévention et Modération. Début septembre, à l’occasion de la journée internationale des troubles causés par l’alcoolisation fœtale (TCAF), vous vous êtes fait le relais du message zéro alcool pendant la grossesse auprès de l’ensemble des bénévoles des 79 Banques Alimentaires. Pouvez-vous nous présenter les grandes lignes de ce partenariat et comment il s’inscrit dans votre programme Prévention santé ?

Prévention et modération soutient la FFBA dans la mise en œuvre du projet « prévention santé » en apportant  un soutien financier important. Ce soutien se décline en deux phases : la première année est consacrée à la conception et l’édition de documents pédagogiques à destination des personnes accueillies à l’aide alimentaire. La seconde année permettra la conception et la diffusion de la formation « Précarité Alimentaire » sous forme digitale.
Nous avons été très heureux d’accueillir le 5 octobre dernier le président de SAF France. Son intervention auprès des animatrices d’ateliers cuisine-prévention santé sur le syndrome d’alcoolisation fœtale, a été très appréciée et permettra à notre équipe de relayer plus efficacement les messages sur le terrain.